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Derniers soupirs d'un parnassien (1)
I
                       Klop, klip, klop, klop, klip, klop.
Goutte à goutte égrenant son rythmique sanglot
Aux vasques du bassin où l'eau dort immobile
Un jet d'eau trouble seul la nuit calme et tranquille.
Quel silence! On dirait que ce globe assoupi
Sur des flots de velours glisse dans l'infini.
Là-haut, criblant l'Espace à des milliards de lieues,
Pèlerins ennuyés des solitudes bleues,
Sans souci des martyrs qui grouillent sur leurs flancs,
Enchevêtrant sans fin leurs orbes indolents,
- Oasis de misère ou cadavres de mondes -
Les sphères d'or en chœur circulent vagabondes.
Mon être, oublions tout! lâchons les rênes d'or
Aux contemplations éployant leur essor
Les strophes en mon sein battent déjà de l'aile...
À quoi bon les plier dans un mètre rebelle!
Je ne veux rien savoir, le vertige énervant
Me berce dans les plis de son gouffre mouvant...
Je me fonds doucement.., je suis mort, rien.., je doute
Si j'entends le jet d'eau ponctuer goutte à goutte
Le silence éternel d'un rythmique sanglot
                       Klop, klip, klop, klop, klip, klop...
Bibliothèque Sainte-Geneviéve, 21 avril 1880.
Jules Laforgue

1ère publication:
Poésies Complètes (Le Livre de Poche) 1970

Nota: Voir > Fleur de rêve.

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