Ah! triste, n'est-ce pas, triste, inutile et sale,Soleil couchant de juin
Ta besogne, ô Soleil, malgré tes aubes d'or,
Malgré tes beaux couchants si douloureux d'essor,
Roses d'amour de quelque ardente cathédrale!Partout, toujours, fouailler les Vices noirs blottis!
- Car, depuis que la vie ici-bas est éclose,
Ò cœur de Pureté, tu ne fais autre chose
Que chasser devant toi des êtres de leurs lits!À travers nos rideaux tu sonnes tes fanfares
Et les couples poussifs aux yeux bouffis d'amour
Réparent leur désordre, en se cachant du jour
Qui glace les sueurs des voluptés trop rares.Mais tu ne songes pas que là-bas, ô Soleil,
Là-bas, l'autre moitié n'attendait que ta chute,
Et rentre en ce moment dans ses fanges de brute
En prétextant le noir,... l'usage,... le sommeil!Or, à notre horizon tu n'es pas mort encore
Pour aller fustiger de rayons ces pourceaux,
Que nos millions de lits referment leurs rideaux
Sur des couples rêvant de ne plus voir l'aurore!- Ah! triste, triste va, triste, inutile et sale,
Ta besogne, ô Soleil!, malgré tes aubes d'or,
Malgré tes beaux couchants si douloureux d'essor,
Roses d'amour de quelque ardente cathédrale,Jules Laforgue30 juin, Luxembourg.1ère publication:
Poésies Complètes (Le Livre de Poche) 1970